Galerie Vincent Lecuyer, Paris ;

Sa vente, Paris, Hôtel Drouot, Kâ-Mondo, 28 mai 2020, n° 71 ;

Acquis lors de cette vente par l’actuel propriétaire  ;

Collection particulière, Paris

De par sa facture minutieuse et résolument moderne, notre petit dessin constitue un rare témoignage des développements que connaît l’œuvre du peintre tchèque Jan Preisler un peu avant 1910, nourrie par le séjour parisien de l’artiste et son assimilation des avant-gardes de la capitale. Formé à l’École des arts appliqués de Prague, où il est l’élève de František Ženíšek, il fréquente le Cercle artistique Mánes et participe à la fondation de la revue Volné smëry [« directions libres »], dont il réalise les illustrations durant plusieurs années. Après avoir conçu les affiches de l’exposition d’Edvard Munch de 1905 à Prague. Séjournant à Paris en 1906, il est vivement marqué par la première rétrospective consacrée à Paul Gauguin au Salon d’Automne et oriente sa production vers un plus grand synthétisme. 

Réalisée en 1908, à un moment charnière où l’artiste approfondit son langage épuré et onirique, notre feuille reprend une ancienne composition de 1901, illustrant un poème de son compatriote Jan Neruda (fig. 1), pour en proposer une version simplifiée à l’extrême. Il montre un jeune homme en buste, saisi en pleine rêverie, adossant son imposante stature contre deux frêles arbustes. Le visage, légèrement tourné, est défini par un trait précis et souple, les masses sont seulement suggérées en lignes sinueuses. Rehaussé de délicates touches d’or qui flottent comme un pollen lumineux ou une brume stylisée, le fond diffuse autour de la figure une aura vibrante, presque sacrée, propre aux expérimentations décoratives de l’Art nouveau du centre de l’Europe, Gustav Klimt en particulier. 

Fig. 1 : Portrait d’homme, illustration d’un poème de Jan Neruda, 1901, fusain, pierre noire et rehauts de gouache blanche sur papier (57,8 x 45,5 cm), Narodnie Galerie de Prague.