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Jean MERMOZ MANUSCRIT autographe, [fin 1934 ?] ; 16 pages in-4 au crayon, avec ratures et corrections (le début manque). TRES IM...
Estimation :
35 000 - 40 000 €
Vendu :
44 611 €

Description complète

Jean MERMOZ MANUSCRIT autographe, [fin 1934 ?] ; 16 pages in-4 au crayon, avec ratures et corrections (le début manque). TRES IM...

Jean MERMOZ
MANUSCRIT autographe, [fin 1934 ?] ; 16 pages in-4 au crayon, avec ratures et corrections (le début manque).
TRES IMPORTANT EXPOSE SUR LE DEVELOPPEMENT DE LA LIGNE D'AMERIQUE DU SUD ET LA TRAVERSEE DE L'ATLANTIQUE POUR LE SERVICE POSTAL ET POUR DES PASSAGERS, AVEC UN PARALLELE ENTRE L'AVION ET L'HYDRAVION, ET LE RECIT DE SES TRAVERSEES.
Pour Mermoz, " l'avion et l'hydravion on chacun leur place dans l'avenir des traversées aériennes transatlantiques commerciales :
L'avion au point de vue purement postal
L'hydravion au point de vue purement passagers ".
Il faut d'abord envisager " la question postale sur la ligne d'Amérique du Sud [...] C'est la seule susceptible de faire vivre économiquement cette ligne malgré toutes les réductions de subventions à envisager ", le problème des passagers passant au second plan. " Or pour transporter du courrier, le gros tonnage et le confort sont des éléments inutiles et superflus. Il faut tendre simplement sans cesse vers la plus grande vitesse pour une utilisation de puissance et un tonnage limité économique ", alors que pour les passagers " la plus grande sécurité, le gros tonnage et le confort " sont essentiels. " L'avion postal doit en principe ne jamais perdre de temps. Il va sans cesse contre la montre, passe aux escales à toutes les heures du jour et de la nuit, tend toujours à gagner sur un horaire plus ou moins bien défini. Le pilote qui voyage avec son radio et le courrier a le droit de risquer davantage, en toute conscience professionnelle et en toute connaissance de son devoir avec une complète liberté d'esprit ". Pour les passagers, au contraire, la sécurité est primordiale, et coûteuse en personnel et en infrastructures. Pour lui, " les nécessités d'une exploitation de ligne postale sont souvent incompatibles avec celle d'une ligne de transports ", et il ne croit pas, sur le parcours de la ligne France-Amérique du Sud, aux solutions mixtes " qui diminuent la valeur respective des deux formules d'exploitation, en sacrifiant l'une au profit de l'autre "...
Il faut adopter l'avion (et écarter l'hydravion) pour le service postal, pour la vitesse d'abord, " base fondamentale des traversées transatlantiques postales régulières ".... " Le pilotage sans visibilité aux instruments représente un progrès considérable et ses possibilités certes sont immenses tout particulièrement dans la brume, les plafonds bas et même dans un grand nombre de systèmes orageux européens [...], mais il existe des temps dans lesquels je ne m'engagerai pas en pilotage sans visibilité et de nuit ". Quant aux perturbations météorologiques sur l'Atlantique Sud, elles peuvent être très dangereuses, sans compter " le fameux pot-au-noir ", notamment lors de la mousson. " Pour ma part, j'ai eu l'occasion d'en rencontrer deux fois entre Natal et le rocher St Paul dans la zone de l'île Fernando de Noronha. La première fois de jour ce n'était pas une succession de grains relativement espacés comme ceux du pot-au-noir mais un véritable système cyclonique avec un front de tornade barrant la route d'Est en Ouest sur une distance inappréciable parce que trop étendue, aux nuages collés à l'eau avec par endroits quelques trombes marines suffisamment caractéristiques par leur forme pour ne pas les reconnaître comme extrêmement dangereuses. La mer était démontée et semblait se soulever comme aspirée. Pour passer au-dessus, il aurait fallu au moins atteindre cinq mille mètres pour trouver le calme. Changeant de route et circulant pendant vingt bonnes minutes vers l'Est, en bordure de ce front sans fissures, j'ai fini par trouver une vague issue qui semblait plus claire et m'y suis engagé. En deux abattées successives, l'appareil engagé à fond est descendu jusqu'à l'eau. De justesse il s'est redressé sous l'effort désespéré des commandes. En même temps nous sommes entrés dans une véritable masse d'eau qui semblait s'écrouler. Pendant un quart d'heure, propulsés par les rafales de vent dans un véritable déluge, à quelques mètres d'une mer démontée, Dabry, Gimié, Collenot (et moi) avons trouvé les minutes longues… Puis peu à peu tout se calma dans une pluie très dense comme celle des queues de tornade. Gimié put passer le fatidique T.V.B. " Mermoz raconte une autre perturbation qui l'obligea, après plusieurs tentatives, à retourner se poser, non sans mal, à Natal. Il n'est pas sûr qu'il aurait réussi à s'en sortir par nuit noire et en pilotage sans visibilité. Il vaut donc mieux, pour ne pas courir au désastre à cause des importantes perturbations atmosphériques, porter l'effort sur les vols transatlantiques de jour. Avec une vitesse de croisière de 300 km à l'heure de croisière, " on ira de Port-Etienne à Porto-Praïa en 3 heures ; de Porto-Praïa à Noronha en 7 heures ; de Noronha à Natal en 1 heure 20 ; de Dakar à Noronha en 8 h 45 ; de Dakar à Natal en 10 h. Je pense que voilà la véritable sécurité. Il est préférable de passer 10 h sur l'eau et de jour que d'y rester vingt ou vingt-trois heures "... Mermoz expose alors le développement des infrastructures des terrains à Praïa, l'île Maio, à Noronha, à Recife : " La plus longue distance transatlantique sans escale ne sera plus que 2.150 km ". Il veut aussi développer les liaisons radio, notamment avec les bateaux, par un accord entre Air-France et les compagnies maritimes...
L'autre raison d'adopter l'avion au point de vue postal est la question du tonnage. Prendre des hydravions pour assurer à la fois le service du courrier et celui de passagers présente de gros risques financiers et de sécurité ; la rentabilité ne sera pas assurée, et le moindre accident annulerait tous les efforts. Mermoz donne des chiffres qui montrent l'avantage d'un développement d'un service postal rapide et régulier, qui assurerait un gain de temps d'une vingtaine de jours sur le service normal : " On peut penser que le poids du courrier triplera et quadruplera rapidement. [...] Pour réaliser une exploitation économique il faut des appareils rapides et économiques, avec des appareils du type le Comet de Haviland de la course Londres Melbourne qui peut transporter 160 kgs de poste à 320 km à l'heure sur un parcours de 3600 km et cela avec moins de 500 chevaux consommant 75 litres d'essence et 1 l. d'huile à l'heure, on peut arriver à une exploitation postale hebdomadaire coûtant moins de vingt cinq millions par an. En doublant la fréquence l'augmentation des frais généraux ne dépasse pas 5 à 6 millions. Or si 130 kgs de poste hebdomadaires correspondent à 20 millions de recettes annuelles, si en doublant la fréquence on double le courrier, il est facile de se rendre compte que la ligne France Amérique du Sud peut vivre et peut être assurée d'une existence normale, même si l'on diminue un jour les surtaxes postales "... Cela n'empêchera pas de penser un jour à une ligne de prestige pour les passagers, avec une subvention comme celles accordées aux compagnies de paquebots...
" Pour le moment, il n'y a qu'un effort à faire. Comme je l'ai déjà dit il n'existe en ce moment pour moi ni avion ni hydravion sur l'Atlantique Sud. Je suis prêt à prendre l'un comme l'autre sans m'arrêter à une question de formule. J'ai tenu simplement à mettre certaines choses au point à formuler des idées sur un avenir plus ou moins immédiat ".
Puis Mermoz revient sur l'avantage de l'avion qui " a toujours été en tête du progrès aéronautique. L'avion va plus vite plus haut et plus loin que l'hydravion. Il l'a prouvé dans maintes expériences par maints records. À l'heure actuelle il n'y a pas d'hydravion capable de battre l'avion quant à la vitesse, le plafond, la charge utile emportée, le rayon d'action et il faut bien penser que si l'hydravion gagnait en qualités techniques, celles de l'avion augmenteraient proportionnellement dans le même ordre de grandeur ". En cas d'amerrissage forcé, l'avion offre plus de sécurité que l'hydravion... " On peut donc reconnaître à l'avion un rôle important à jouer dans la solution d'un problème qui exige la plus grande charge utile à emporter pour un maximum de rendement économique et de vitesse. [...] Je pense d'abord qu'un avion marchant à 300 km à l'heure grâce à sa finesse, à son hélice à pas variable et d'ici peu à son compresseur a moins de chance de panne et d'incident de vol en 7 ou 10 h. de traversée qu'en 20 ou 23 h. de vol. Quand l'hydravion fera du 300 km à l'heure, l'avion fera du 400 km. Il restera toujours moins longtemps au-dessus de la mer, et cela, c'est déjà la première sécurité. Dès que l'Ile Fernando-de-Noronha va posséder sa piste de départ [...], il faudra sept heures pour aller de Praïa îles du Cap Vert à Noronha. Si un avion terrestre bi ou trimoteur est calculé pour voler à pleine charge avec un des moteurs stoppé, je doute fort qu'il ne puisse rejoindre étant à mi-route l'une ou l'autre de ses escales : au maximum en 3 h 30 de vol. Lorsque les hélices à pas variable seront définitivement au point, pourquoi un trimoteur, ne serait-il pas calculé pour au départ n'être autre chose qu'un bi-moteur emportant son troisième moteur stoppé avec une hélice au pas complètement effacé comme secours ? "...
Et il conclut : " La technique aéronautique fait de tels progrès et les possibilités d'avenir sont si vastes que l'on doit se détacher de plus en plus de la crainte de venir au sol ou à l'eau malgré soi. Il ne faut pas préjuger de garantir une sécurité complète. Il n'y aura des sacrifices à consentir quoi que l'on fasse pour les éviter. Ils sont trop à l'abri des raisonnements et des discussions pour que l'on s'y attarde. Mais avec une infrastructure solidement établie, une organisation météorologique et radio goniométrique solide, si les compagnies de navigation maritime s'intéressent davantage au sort des traversées aériennes transatlantiques, on peut envisager l'avenir avec sérénité ".

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